03210010 - Histoire du droit du travail

Niveau de diplôme
Volume horaire total 20
Volume horaire CM 20

Responsables

Contenu

De quoi parlera-t-on ?

Ce cours cherche à stimuler la réflexion des étudiants en leur présentant deux ouvrages passionnants relatifs à l’histoire du droit du travail et de la protection sociale.
Le premier est un livre de Jacques Le Goff intitulé Du Silence à la parole (1830-1989), publié pour la première fois en 1985 aux éditions Calligrammes. Il décrit le cheminement qui a permis aux salariés d’acquérir un droit d’expression dans l’entreprise et de passer progressivement d’une soumission totale à une « citoyenneté » relative. On suivra, pas à pas, les évolutions des rapports de pouvoir au sein de l’entreprise en montrant que les patrons ont d’abord bénéficié d’un pouvoir absolu leur permettant de traiter les ouvriers comme des sujets, dépourvus de droits et réduits au silence. À partir des années 1880, les salariés ont acquis progressivement un droit à l’expression, sans que les innovations institutionnelles ne remettent pour autant en cause le caractère monarchique du gouvernement de l’entreprise. Le travail de Jacques Le Goff mérite d’être présenté aux étudiants car il explique comment le droit du travail actuel s’est construit, en s’intéressant à la fois à l’évolution des règles de droit proprement dites et à la transformation des représentations culturelles dominantes. Il montre que « le salarié », « l’employeur », et « l’entreprise » ne sont pas regardés de la même manière à toutes les époques de l’histoire, et que l’évolution de leur image exerce une influence sur le contenu des règles de droit.

Le deuxième texte présenté durant ce cours est le livre du sociologue Robert Castel intitulé Les Métamorphose de la question sociale (Fayard, 1995). Ce livre remontre loin en arrière puisqu’il s’intéresse au traitement de l’assistance à partir du moyen Age, en montrant que la société et les pouvoirs laïcs et religieux se sont attachés très tôt à opérer une distinction entre les « bons » et les « mauvais » pauvres. Alors que les premiers bénéficièrent d’une certaine aide sociale, les seconds firent l’objet d’un large délaissement voire de mesures de répression pouvant aller jusqu’à la sanction pénale. Des critères précis se mirent en place qui conduisirent à ne prendre en charge (ou à n’aider) que certains pauvres particuliers, ancrés dans un territoire déterminé et soumis à une situation leur retirant au moins partiellement la capacité de travailler (vieillesse, maladie, folie, charges de familles). Le livre de Castel a quelques résonnances contemporaines puisque certaines logiques décrites dans son travail se retrouvent aujourd’hui encore dans le traitement de la question sociale (voir les débats sur l’assurance chômage et sur la chasse aux « faux » chômeurs). Cet ouvrage a aussi le mérite de proposer une véritable Chronique du salariat, en rappelant que la condition de salarié fut autrefois dévalorisante et redoutée (car dépourvue de protections et infâmante socialement) avant de devenir progressivement, au fil du XXe siècle, une condition enviable permettant d’échapper à la précarité. Les réformes de la Libération de 1944 furent essentielles et s’inscrivirent dans un mouvement plus général qui permit de passer progressivement d’une logique assistancielle à une logique assurantielle.
 

Pourquoi est-ce important d’en parler ?

La connaissance de l’histoire du droit social est nécessaire pour bien comprendre les grands débats actuels (sur la réforme du code du travail, le régime des retraites et de l’assurance chômage, etc.) et leurs enjeux sous-jacents.

Nous souhaitons par ailleurs, grâce à la démarche utilisée (qui délaisse volontairement la simple description de l’évolution des institutions et du droit), inciter les étudiants-auditeurs à développer une approche critique de la règle de droit qui manque trop souvent aux juristes.
 

Comment comprendre aisément ce dont il sera question ?

Pour se préparer au cours et l’aborder sereinement, les étudiants sont invités à se reporter préalablement à :
  • Norbert OLSZAK, Histoire du droit du travail, PUF, collection « Que sais-je ? », 1999.
Les connaissances correspondant aux cours d’histoire du droit de Licence sont tenues pour acquises. Les lacunes éventuelles devront être comblées par un travail personnel.
 

Plan du cours

Trois leçons sont consacrées à l’analyse du livre de Jacques Le Goff (L. II à IV) et trois autres à celui de Robert Castel (L. V à VII). Elles sont précédées d’un exposé général sur l’évolution du statut juridique du travail subordonné (leçon préliminaire), et d’une étude particulière sur la Révolution de 1789 et le monde du travail (L. I).

Bibliographie

  • Jacques LE GOFF, Du silence à la parole, Droit du travail, société, État (1830-1989), Calligrammes, 1985, rééd. 2004 (Presses universitaires de Rennes)
  • Robert CASTEL, Les Métamorphoses de la question sociale, Une chronique du salariat, Fayard, 1995, rééd. 2010 (Folio essais).

Instrument de travail :
  • Jean-Pierre LE CROM (dir.), Deux siècles d’histoire du droit du travail, l’histoire par les lois, éditions de l’Atelier, 1998.