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[Colloque] : La circulation des sociétés dans l’Union Européenne

Publié le 3 mai 2023 Mis à jour le 3 mai 2023
colloque circulation société UE
colloque circulation société UE

Direction scientifique : Mathieu COMBET, Maître de conférences en droit privé à la Faculté de Droit de Saint-Étienne (CERCRID - UMR CNRS 5137) & Jeremy HEYMANN, Professeur de droit privé à l’Université Jean Moulin Lyon 3 (EDIEC/CREDIP – EA 41 85).

Depuis les années 1990, le droit d’établissement des sociétés, au sein du marché intérieur, a connu une évolution sans précédent. En tant qu’opérateurs économiques, les sociétés devaient être les premières bénéficiaires de ce marché, mais leur circulation est restée longtemps entravée, faute d’un encadrement juridique satisfaisant à l’échelle de l’Union.

Cette carence a été comblée dans un premier temps par l’activisme de la Cour de justice de l’Union européenne, offrant aux sociétés la possibilité de jouir des moyens nécessaires à leur circulation. C’est ce qui ressort de la jurisprudence qui est allée bien au-delà d’une simple coordination des droits nationaux.

Depuis l’arrêt Centros du 9.03.1999 (C-212/97), la Cour de justice a en effet profondément modifié la condition juridique des sociétés, en bouleversant la notion même d’établissement. Si le rattachement des sociétés au territoire d’un État membre constitue une condition inhérente à leur existence, l’exercice du droit d’établissement permet de faciliter la circulation de celles-ci sans pour autant remettre en cause la compétence normative des États membres, lesquels restent les seuls à pouvoir déterminer les conditions de création, de fonctionnement et de dissolution des sociétés. La jurisprudence de la Cour de justice se montre cependant favorable à ce que les sociétés puissent fusionner, se scinder ou transférer leur siège social d’un État membre à un autre sans être tenues de subir une liquidation et la perte de leur personnalité juridique, comme l’a reconnu la Cour de justice dans son arrêt Polbud du 25.10.2017 (C-106/16).

Dans un second temps, le législateur de l’Union a enfin pris le relais de la Cour de justice, aux fins d’offrir aux entreprises les outils nécessaires à leur circulation. Le premier texte devant être mentionné en ce sens est la directive (UE) n°2019/2121 du Parlement européen et du Conseil du 27.11.2019 modifiant la directive (UE) 2017/1132 en ce qui concerne les transformations, fusions et scissions transfrontalières (JOUE, L 321 du 12.12.2019, p. 1). Le deuxième texte est la directive (UE) 2019/1151 du Parlement européen et du Conseil du 20.06.2019 modifiant la directive (UE) 2017/1132 en ce qui concerne l’utilisation d’outils et de processus numériques en droit des sociétés (JOUE, L 188 du 11.07.2019, p.80). Enfin, il y a la directive (UE) 2019/1023 du Parlement européen et du Conseil du 20.06.2019 relative aux cadres de restructuration préventive, à la remise de dettes et aux déchéances, et aux mesures à prendre pour augmenter l’efficacité des procédures en matière de restructuration, d’insolvabilité et de remise de dettes, dite « restructuration et insolvabilité ». Cette dernière directive a été transposée en droit français par une ordonnance du 15.90.2021 (Ord. n°2021-1193, JORF 16.09.2021), complétée par un décret du 23.09.2021 (D. n° 2021-1218, JORF 24.09.2021).

L’objectif de ces textes est de favoriser la circulation des sociétés tout en offrant aux États membres des garde-fous contre des risques d’abus notamment à l’encontre des droits des travailleurs, des actionnaires et des créanciers. Ce nouveau cadre législatif influence ainsi le droit des sociétés, mais aussi le droit social, le droit de la concurrence, le droit fiscal, ou encore le droit financier.

Il s’avère ainsi opportun de s’interroger sur l’articulation entre la jurisprudence de la Cour de justice et ces textes qui, pour certains, doivent être transposés début 2023.

Plusieurs axes de réflexion sont proposés en vue d’identifier les traits saillants de cette nouvelle phase d’harmonisation du droit européen des sociétés : les notions et les principes (axe 1), les règles matérielles (axe 2) et les règles conflictuelles (axe 3).