- Droit,
Conférence - L'élection du président des États-Unis
Conférence du Collège de droit - cycle américain
Intervenant :
Vincent Michelot,
Professeur de civilisation américaine
Vice-Président Relations internationales de l’ENS de Lyon
Résumé de conférence
Les États-Unis en 2024 : Une élection au cœur des divisions nationales
Dans un climat de polarisation extrême et d’enjeux globaux, les regards du monde entier s’étaient tournés vers les États-Unis à la veille de leur élection présidentielle. Avec une population de 355 millions d’habitants, ce scrutin allait non seulement façonner l’avenir de la nation américaine, mais aussi influencer les relations internationales. Ce fut dans ce cadre qu’a eu lieu la rencontre avec Vincent Michelot, professeur de civilisation américaine et vice-président des relations internationales à l’ENS de Lyon, qui a apporté une analyse précieuse des enjeux politiques et électoraux des États-Unis.
Tout d’abord, il convient de souligner qu’avant le jour du scrutin, 77 millions d’Américains avaient déjà exprimé leur vote, un chiffre qui a continué d’augmenter tout au long de la campagne. Finalement, la participation a frôlé les 165 millions d’électeurs, témoignant de l’importance capitale de cette élection. L’élection présidentielle américaine repose sur un système de grands électeurs, dans lequel chaque État attribue ses votes en fonction des résultats locaux. Par exemple, en Pennsylvanie, le nombre important de grands électeurs pouvait effectivement être déterminant pour l’issue du scrutin. Toutefois, des États comme le Nebraska et le Maine ont choisi un mode de distribution proportionnelle, ce qui a ajouté une complexité supplémentaire au processus électoral.
Par ailleurs, une autre caractéristique importante a été l’utilisation des machines à voter. Environ 98% des Américains ont eu recours à ces dispositifs, mais avec des écarts notables en termes de technologie. Certaines machines étaient obsolètes, datant des années 50, tandis que d’autres étaient plus récentes. Cela a soulevé des questions sur la sécurité et l’accessibilité du vote, des préoccupations essentielles pour garantir la transparence et la fiabilité du processus électoral.
Au-delà de l’élection présidentielle, les électeurs ont également été appelés à renouveler les membres de la Chambre des représentants (435 sièges) et du Sénat (34 sièges), tout en prenant part à des référendums d’initiative populaire et à des élections locales. Ces scrutins ont joué un rôle majeur dans la mobilisation des électeurs, certains se rendant aux urnes principalement en raison de ces enjeux locaux, et non de l’élection présidentielle elle-même. Ainsi, la mobilisation des électeurs a constitué un axe central des stratégies de campagne, les partis politiques ayant de plus en plus recours à des données électorales pour cibler les électeurs de manière plus précise et influente.
Dès lors, les résultats sont désormais connus : Donald Trump a été élu 47e président des États-Unis, remportant 306 votes électoraux contre 232 pour Kamala Harris. Avec une avance de 2,1 % dans le vote populaire, sa victoire s’est construite dans des États pivots comme la Pennsylvanie et le Wisconsin, où son message a réussi à mobiliser l’électorat rural et conservateur. Cette victoire, marquée par une division évidente entre les zones urbaines et rurales du pays, reflète une Amérique profondément partagée mais galvanisée par des enjeux politiques majeurs.
De surcroît, un phénomène particulier a marqué cette élection : le ticket splitting, où les électeurs ont choisi des candidats de partis différents pour différents postes. Ce comportement a démontré la diversité des opinions au sein de l’électorat américain et a obligé les partis à affiner leur stratégie de campagne. Plutôt que de se concentrer uniquement sur la persuasion des indécis, les partis ont mis l’accent sur la mobilisation des électeurs déjà favorables, cherchant à les amener aux urnes.
Dans ce contexte, bien que les deux partis traditionnels, démocrate et républicain, restent dominants, des mouvements populistes ont émergé, mais ont eu du mal à s’établir de manière pérenne. En effet, malgré ces tentatives, les tiers candidats ont rencontré d’énormes difficultés pour s’impliquer dans le processus électoral, ce qui a consolidé le pouvoir bipartite dans le pays. Ce cadre a permis aux deux grandes formations politiques de maintenir une emprise significative sur le paysage politique américain.
En outre, les résultats des élections ont révélé des clivages profonds au sein de la société américaine. Si Kamala Harris, réélue vice-présidente, a poursuivi la politique de l’administration Biden, notamment en matière de libertés civiles et de multilatéralisme, la victoire de Donald Trump a été synonyme d’un retour au protectionnisme et d’une politique plus isolée à l’international. Cette dynamique a renforcé la division entre les deux camps et a montré que la polarisation politique n’avait cessé de se creuser au fil du temps.
L’élection présidentielle américaine de 2024 se présente ainsi comme un tournant dans l’histoire des États-Unis. Avec un retour triomphal de Donald Trump, les États-Unis se trouvent à un croisement crucial. Le pays demeure profondément divisé, et ce scrutin a non seulement révélé les fractures internes, mais aussi mis en lumière des enjeux mondiaux d’une portée considérable. La question demeure : quelle sera l’ampleur de la fracture politique dans les années à venir ?
Aya- Thérèsia Jabbour
Première année en licence de droit
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